les silencieuses
La majeure partie des textes qui ont été écrits au sujet du désir et du plaisir ont été signés par des hommes. Avec Frédérique Aït-Touati, nous voulions partir en quête de la parole féminine sur le sujet. Mais durant deux années de recherche, nous avons découvert une suite ininterrompue de textes, répartis sur plus de deux millénaires, qui interdisaient aux femmes occidentales de parler de leur corps et de leurs désirs.
De cette histoire je ne savais à peu près rien, comme si elle ne m'avait pas concerné. En leur imposant la discrétion et la pudeur, en leur refusant l'accès à la célébrité, ces textes rendaient notre spectacle impossible, un peu comme s'ils nous avaient nous-aussi bâillonnés.
En tant qu'homme, je n'avais jamais fait l'expérience d'être empêché dans ma parole. Pour la première fois je découvrais dans mon corps la violence de ces injonctions. Notre trajectoire d'écriture s'est alors recentrée sur ce cheminement singulier.
Jusqu'à quel point cette tradition misogyne a-t-elle imprégné notre imaginaire collectif, et par conséquent ma propre masculinité ? Si je ne veux pas reconduire ce tacite héritage sur mon fils, il m'appartient de regarder en face ces mémoires oubliées qui agissent à mon insu,
d'ancrer le Masculin ailleurs que sur la peur et la haine du Féminin, et aussi de témoigner de ce voyage.
(Nicolas Raccah)
"Prise de conscience époustouflante de la manière dont les hommes ont muselé la parole érotique des femmes."
(Marie de Hennezel - Psychologies Magazine)